Droit de la construction : « L’extension de la garantie décennale aux éléments d’équipement installés sur existant »

Cass. 3ème civ., 14 sept. 2017, n° 16-17323, FS-PBRI

Il est établi que le constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit pendant 10 ans des désordres graves qui affectent l’ouvrage dans l’un de ses éléments d’équipement à condition qu’ils le rendent impropre à sa destination. En revanche, jusqu’à présent, la jurisprudence excluait du champ d’application de la responsabilité décennale les éléments d’équipement dissociables dès lors qu’ils étaient adjoints à l’existant.

En l’espèce, un appareil de chauffage inséré à l’intérieur d’une cheminée ornementale existante avait causé un incendie dans l’immeuble préexistant. Cet insert a été qualifié d’élément d’équipement dissociable adjoint à l’existant, et l’on s’attendait donc à l’exclusion de l’engagement de la responsabilité décennale du constructeur.

Pourtant, la Cour de cassation, par un attendu de principe, retient que « les désordres affectant les éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ».

Cette solution simplifie le régime juridique de la garantie décennale puisque désormais la seule condition à prendre en compte est que le désordre rende l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination, peu importe que l’élément d’équipement soit dissociable ou non, et qu’il soit d’origine ou installé sur existant.

Il n’en demeure pas moins qu’elle contrevient aux dispositions de l’article L. 243-1-1, II, du Code des assurances selon lequel les obligations d’assurance de responsabilité civile décennale qui incombent respectivement au maître de l’ouvrage et au constructeur « ne sont pas applicables aux ouvrages existants avant l’ouverture du chantier, à l’exception de ceux qui, totalement incorporés dans l’ouvrage neuf, en deviennent techniquement indivisibles ».

Une manière de rendre compatible cette disposition avec le principe nouvellement posé par la Cour de cassation consisterait à considérer que le texte susvisé continue à s’appliquer en l’absence de stipulations contractuelles contraires, lesquelles pourraient donc intégrer le nouveau principe. Les constructeurs devront être particulièrement vigilants sur les garanties souscrites auprès de leur assureur, et veiller à ce que soit prise en compte cette nouvelle extension de garantie décennale aux éléments d’équipement dissociables installés sur existant. À défaut, ces derniers ne pourront peut-être pas appeler en garantie leur assureur.